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Romans et Lectures - Blog de lecture
14 mai 2008

Toutes les familles sont psychotiques - Douglas Coupland

Il y a des romans que l'on aborde avec enthousiasme avant même d'en avoir lu la première ligne... Le plaisir de retrouver un auteur qui vous a laissé un bon souvenir de lecture et une collection qui réserve en général de bonne surprises (10/18, "Domaines étrangers"),  une couverture pas trop moche, un titre accrocheur : suffisant pour aiguiser l'appétit du lecteur.

Cet enthousiasme est cependant à double tranchant, car le livre doit alors être à la mesure des espoirs qu'on lui prête, faute de décevoir doublement... C'est dans cet état d'esprit que j'ai abordé la lecture de Toutes les familles sont psychotiques, avec en mémoire mes deux précédentes lectures de Douglas Coupland : Microserfs et surtout le très bon Génération X.

Couverture : Toutes les familles sont psychotiques - Douglas Coupland

Pour ceux qui ne connaissent pas Coupland, dites-vous que l'impression que vous vous en êtes faites à la lecture de l'étrange titre à rallonge du roman est à peu près juste : cet auteur canadien est effectivement plutôt inventif et loufoque, un bref résumé du début du roman devrait suffire à vous en convaincre :

La famille Drummond doit se retrouver à Cap Canaveral pour assister au décollage de la navette spatiale. Ce décollage est particulièrement important pour eux puisque leur fille aînée Sarah fait partie du voyage. Les retrouvailles devraient cependant être laborieuses : les parents (Ted et Janet) sont divorcés, les deux frères de Sarah (Bryan et Wade) sont plutôt instables et Wade semble définitivement brouillé avec son père. Oh, j'oubliais : Janet est devenue séropositive après avoir été blessée par une balle de revolver. Cette balle, tirée par Ted et initialement destinée à son fils a contaminé Janet en traversant le foie de Wade, contaminé par le Sida...

Vous conviendrez que l'on ne peut pas reprocher à Coupland de ne pas faire preuve de créativité et d'originalité pour ce qui est de la trame de son histoire. Et je suis loin d'avoir fait le tour des surprises que réserve le récit...

On aura donc compris que le roman est une réflexion sur la famille et une tentative de démonstration par l'absurde de l'importance des liens familiaux. Une des thèses de Coupland est que l'on affuble notre propre famille de tous les maux (d'où le titre) mais que contrairement à ce que l'on pense, ça n'est pas mieux ailleurs. Le sujet est prétexte à bien d'autres réflexions sur la famille et les rapports mari/épouse, père/fils, mère/fils, frère/soeur,etc..

"Les gens sont très indulgents pour la famille des autres. La seule qui vous horrifie vraiment, c'est la vôtre."

Sur le style, Coupland joue sur les dialogues déjantés, qu'il saupoudrent d'assertions sur notre société de consommation, l'Amérique, la maladie, la science, la drogue, les rapports humains, etc... le tout épicé de quelques italiques dont l'auteur semble raffoler. On accroche ou pas.

"Ce n'est pas qu'ils soient incapables de faire attention aux autres - c'est que ça ne leur traverse pas l'esprit. Ils sont si différents des femmes." (une réflexion de Janet, sur son mari et ses fils)

Personnellement, j'ai trouvé le livre plaisant, certains passages sont vraiment très drôles et je ne me lasse pas des petites assertions de Coupland. Le roman n'est cependant pas que loufoque, le drame n'est souvent pas loin : la verve de Coupland et de ses personnages semble plus cacher un désespoir profond que se placer là pour amuser la galerie. On retrouve d'ailleurs ce désespoir de personnages un peu paumés dans Microcerfs et dans Génération X. Il y également quelques trouvailles intéressantes, notamment dans les descriptions :

"Wade avait l'impression d'être plongé dans un bain moussant parfumé à la famille ordinaire." (Wade, à Disneyland)

"En effet, tout ce qui était dans la pièce avait l'air... étincelant. Ou rose. Ou pelucheux. Ou en cuivre. En tout cas, il ne subsistait plus le moindre angle droit. «Charmant» commenta Janet." (plus tard dans le roman, pour décrire un intérieur au goût plus que douteux)

"Au premier regard qu'il avait porté sur elle, son coeur s'était brisé en mille morceaux et régénéré dans le même temps." (le coup de foudre de Wade)

En revanche, j'ai trouvé la dernière partie du roman un peu longue. Il y a aussi quelques bégaiements dans l'histoire, de grosses invraisemblances un peu faciles, et mon édition (10/18 "Domaine étranger", excellente collection qui constitue la majeure partie de ma bibliothèque) comportait pas mal de coquilles, surtout vers la fin : lassitude de la part du traducteur ? Au chapitre des détails, une phrase de Janet m'a vraiment étonné : elle qui, dans tout le roman semble avoir un langage relativement posé, dit à son interlocuteur pour aller aux toilettes : "Ernie, je vais farter mes skis". Étonnant non ? Délire du traducteur ou pied de nez de Coupland ? Je ne sais pas.

Pour conclure, je dirais que l'on passe un bon moment avec ce livre, mais qu'il n'est certainement pas exceptionnel. Ce n'est en tout cas pas le meilleur livre pour aborder Coupland : il vaut mieux se tourner vers Génération X.

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Commentaires
C
Je m'en vais voir cela de ce pas...
F
Ayé, je viens de le lire. :)<br /> http://lefantasio.com/index.php?2008/07/14/635-coupland-dougles-generation-x-10-18
C
Aïe, plus de retour en arrière possible... un affreux doute soudain m'envahit. Et si ma mémoire avec le temps avait déformé mon souvenir, et si en relisant maintenant ce livre que j'ai lu à mon adolescence (... rapide calcul : 1992-1972=... tiens ? j'avais 20 ans ?) je le trouvais sans intérêt ? Quelle responsabilité...
F
Ayé, il est commandé ! :)
C
Je serai curieux de lire vos impressions sur "Génération X" : j'espère cependant que vous ne serez pas déçus, et si tel était le cas, que vous ne m'en voudrez pas !
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