L'échappée belle - Anna Gavalda
"L'échappée belle" est un court roman paru en 2001 chez France Loisirs. Il est réédité cette année dans une version revue et corrigée par l'auteur (n'ayant pas lu la première version, je ne peux jouer au jeu des comparaisons, mais "le Beat It de feu Bambi" ou "Bashung en souvenir de Bashung" ne figuraient certainement pas dans la première mouture...).
Garance (la narratrice), Lola et Simon, se retrouvent à l'occasion d'un mariage. Ils décident sur un coup de tête de fuir la cérémonie, laissant là les tantes, les oncles et la belle-soeur pénible pour rejoindre leur frère, Vincent. Bonheur des retrouvailles, joies simples de la vie à la campagne. Bref, le bonheur est dans le pré pour ces parisiens en villégiature...
Comme souvent avec Anna Gavalda, le ton est rapidement donné, avec des dialogues réalistes et naturels, qui campent les personnages de manière efficace. Entre ces dialogues, on a droit à la prose de la narratrice, Garance, qui nous fait part de ses faiblesses, de ses doutes, de ses griefs contre son exécrable belle-soeur ou de ses craintes pour son frère Simon qui subit cette dernière, tout cela sur un ton mi-café du commerce, mi-djeune (avec des bibi, des vioques, des bled, des conneries, des zens, des stone, des neuneu, des imbitables, des pipoles, etc.). Pour l'anecdote, on notera que la narratrice se permet de tutoyer à deux reprises le lecteur (ou la lectrice, plus sûrement) sans autre forme de procès (et sans un minimum de présentations).
Les personnages sont comme souvent avec Anna Gavalda plutôt bien campés, mais ils sont ici particulièrement caricaturaux. D'ailleurs, tout est caricatural dans ce roman, mais l'auteur assume : "Nous sommes bien différentes pourtant.. Elle a peur de son ombre, je m'assois dessus. Elle recopie des sonnets, je télécharge des samples. Elle admire les peintres, je préfère les photographes. Elle ne dit jamais ce qu'elle a sur le coeur, je dis tout ce que je pense (etc.)". On a également droit au cliché des parisiens tombés chez les provinciaux bourrus (limite sauvages de Claude Lévi-Strauss). Ces autochtones ont cependant un sens de l'hospitalité très développé, pour peu que l'on se donne la peine de comprendre le dialecte local : "Et alors, ils vous font rien manger à Paris ?". Ce passage plutôt affligeant se termine par un "Tout cela était pittoresque. Non. Mieux que ça et moins condescendant : savoureux". J'hallucine, comme ne cesse de dire la narratrice que j'ai trouvé plutôt méprisante, à l'image de sa description du beauf, que les postiers possesseurs de GPS devraient apprécier...
Alors, rien de bon dans ce petit livre ? C'est un peu rigolo tout de même, bien que le public visé soit clairement féminin (je me demande si les nombreuses citations de cosmétiques, limites clins d'oeil au lectorat du magazine Elle, dans lequel l'auteur fait des apparitions, existaient dans la première version...). Et puis, un peu d'émotion et quelques larmes aussi tout de même. Pour les inconditionnels de l'auteur.
"L'échappée belle" de Anna Gavalda (2009)
Le dillettante, 166 pages, 10 €