Les aigles puent - Lutz Bassman
S'il y a un exercice auquel je n'aime pas me livrer ici, c'est bien critiquer - au sens négatif du terme - un ouvrage. Cela me met à chaque fois mal à l'aise, pour bien des raisons :
D'abord, en tant que misérable cloporte inculte, ayant eu de surcroît une note misérable au bac français, j'ai quelques scrupules à démonter le travail d'une personne dont la littérature est a priori la spécialité, voire le métier.
Ensuite, j'ai un immense respect pour le travail que représente l'écriture d'un roman, tâche que je pense pouvoir vaguement appréhender par comparaison avec l'exercice de rédaction que représente l'écriture d'un billet tel que celui-ci, et qui pour moi représente déjà une montagne.
Enfin, l'idée de dénigrer un travail dans lequel un auteur a placé tant d'énergie et certainement beaucoup d'espoirs m'est assez désagréable, notamment lorsque l'on pense aux possibles conséquences économiques, même modestes, que pourrait avoir un avis négatif, même si la diffusion de mes bloguesques billets reste assez confidentielle...
Malgré ces réserves, je ne censure pas mes avis négatifs car je ne peux m'empêcher de penser qu'il est sain d'échanger et de donner un avis sur ses lectures, que les personnes qui viennent ici savent qu'elles ne lisent qu'un avis parmi des centaines d'autre avis, qu'elle savent que la plupart des blogs sont tenus par des amateurs passionnés et qu'elles sont suffisament intelligentes pour faire la part des choses... que, quitte à parler de quelque chose que l'on ne maîtrise pas, il vaut mieux parler de littérature que de football, que tout ceci n'est finalement pas bien sérieux.
Bref, tout cela pour dire que je n'ai pas aimé le roman de Lutz Bassman.
J'ai fait part de cet avis négatif dans une chronique publiée sur le site de l'Express (j'ai lu cet ouvrage dans le cadre de la sélection pour le Prix du Livre numérique).
Tout amateur et peu éclairé qu'il soit, j'imagine que mon avis pourrait avoir quelques minuscules conséquences : d'où mes hésitations et ces laborieuses et liminaires précautions.
Mais non. Le roman de Lutz Bassman ne m'a vraiment pas laissé un souvenir impérissable.
Je ne vais pas recopier ici ma chronique sur ce roman, vous pouvez la lire sur le site de l'Express. Mais plusieurs semaines après sa lecture, je maintiens que je n'ai pas adhéré à ce livre et conviens que je n'y ai pas compris grand chose. C'est cependant le style qui m'a le plus heurté et notamment cet usage immodéré des répétitions (souvent de paragraphes entiers) ainsi que quelques maladresses ou lourdeurs dont voici quelques exemples :
"Sa chaise craqua. Il se figea mieux." (Peut-on se figer mieux que l'on est déjà ?)
"La sonnerie de nouveau se fit entendre. Deux notes anodines, une tierce descendante qui ne se prolongeait pas." (Une tierce de deux notes ?)
"Tout indiquait qu'ils avaient quitté pour toujours le monde des vertébrés vivants." (L'élégance de la formule sceintifique)
"De loin, un non spécialiste eût aisément pu le confondre avec une momie ratatinée ou un cadavre de grand brûlé, ou, à la rigueur, avec une tâche de vomi." (Très élégant)
"La présence d'un ventriloque est absolument nécessaire dans l'ancienne agence bancaire de la gare, reprit l'annonce. C'est une question de vie ou de mort." (Un exemple de l'humour très personnel de l'auteur)
"Le vomi se présentait encore au fond de la gorge et jaillissait, mais les spasmes nous torturaient le ventre avec moins de violence. Il nous arrivait même de ne rien expulser pendant les hoquets ou alors seulement de maigres filets et non des gerbes." (Le vomi encore. Charmant)
etc.
Rien à faire. Ça ne passe vraiment pas. Mais comme toujours, je vous invite à lire ce roman pour vous faire votre propre idée, et me contredire s'il le faut.